Le journal intime d’une toulousaine confinée

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Le journal intime d’une toulousaine confinée

On vous raconte

Cher journal,

Tout d’abord je suis désolée de t’avoir délaissé depuis mes quatorze ans et j’espère que tu parviendras à vite me pardonner.

Je tenais tout d’abord à faire une petite mise au point suite à ce que j’ai lu dans les pages précédentes. Premièrement, je ne suis plus amoureuse de Jérémy en 4ème 2, avec qui j’ai totalement coupé les ponts depuis qu’il a refusé de me tenir la main à la fête du village en 2005. Deuxièmement, je ne me souviens absolument pas de qui sont Chloé et Camille mes « meilleures amies » de l’époque. Enfin je ne suis devenue ni chirurgienne ni danseuse, mais je travaille dans le marketing comme 70% des gens de mon âge.

Maintenant nous pouvons (re) démarrer notre relation sur des bases saines.

Notre cher président a annoncé hier soir un reconfinement national. Il nous reste actuellement deux jours de liberté, comprends par cela, deux jours pour choisir où et avec qui moisir pendant le (ou peut-être les) mois à venir.

L’idée de retourner en Auvergne, chez mes parents, comme lors du premier confinement, me fait frémir rien que d’y penser. La soupe aux poireaux c’est sympa trois jours, au-delà cela s’appelle un lavage d’estomac. Je devais vraiment être perturbée par ce mystérieux virus pour accepter la proposition de ma mère.

Cette fois-ci, je ne me laisserai pas amadouer par son chantage affectif.

Mon équipage, prêt à embarquer pour affronter la 2ème vague du COVID-19 sera composé de Rodolphe, mon vieux (et gros) chat adoré et moi-même. Cela ne te fait pas rêver ? Pourtant, si Rodolphe était un homme le site catagecalculator.com m’indique que celui qui partage mon lit serait un sexagénaire de plus de 110 kilos, de quoi donner envie à n’importe qui, n’est-ce pas ?

Notre radeau pour une dérive réussite ? Mon (notre) appartement, de cinquante mètres carrés (balcon compris) au cœur du quartier des Minimes à Toulouse.

Confinement partie 2 : jour 1 :

Aujourd’hui nous sommes lundi, en pire.

En effet aujourd’hui nous inaugurons le début du confinement, mon premier jour de télétravail et le début du mois le plus triste de l’année : le mois de novembre.

 

Je m’autorise donc ce matin à noyer mon aigreur dans un café allongé accompagné de mon petit plaisir coupable : deux tartines de Nutella.

 

La journée est longue, à l’image de la réunion de mon patron de ce matin qui s’est senti obligé de nous faire un tuto sur « comment se servir d’un ordinateur chez soi alors que vous êtes déjà devant un ordinateur toute l’année au bureau ».

 

A 17 heures je décide de sortir faire des courses pour m’aérer l’esprit, bien que mon frigo soit déjà plein. Je passe devant le Café Ginette, mon bistrot préféré où je m’arrêtais souvent en rentrant du travail. Sur sa devanture, une pancarte : « fermé pour raison sanitaire », me met le cafard. Je rentre bredouille et décide de me commander une pizza pour me remonter le moral. Moins de trois minutes après que le livreur soit reparti, Rodolphe, mon plaid et mon épisode de Friend m’attendent de pieds fermes sur le canapé.

Jour 2 :

8 h 00, le réveil sonne et mon cafard d’hier s’est envolé dans la nuit. Deux tartines et un passage express sous la douche plus tard, me voilà devant mon ordinateur, prête pour cette nouvelle journée. Je salue gaiment mes collègues sur notre cellule de chat interne et commence à travailler.

 

En fin d’après-midi alors que Rodolphe dort paisiblement sur mes genoux je décide de profiter de mon élan de motivation pour aller faire du sport. Je ressors mes baskets du fond de mon placard pour inaugurer mon premier footing du confinement. La quantité de poussière qui les recouvre me rappelle qu’il faut urgemment que je résilie mon abonnement à la salle de sport de mon quartier où je n’ai jamais mis les pieds (ou bien qu’il faille urgemment que je me remette au sport, mais la première option me semble bien plus simple). Une fois le long du canal du midi, les rayons du soleil entre les feuilles des grands platanes me réconfortent et me font presque apprécier ma séance de sport. Une heure plus tard je rentre à la maison, fatiguée, mais incroyablement apaisée.

 

À 21 heures, alors que je nettoie les restes de ma tentative de poulet coco -plutôt décevante- mon téléphone sonne. Mince, j’avais complètement oublié notre apéro zoom entre copines. Alors que la voix de mes amies d’enfance résonne dans mon appartement, je débouche une bouteille de vin blanc en entamant la discussion. La soirée passa à une vitesse folle et me fit le plus grand bien.

 

Jour 3 :

Aujourd’hui, je me lève avec la ferme détermination de récidiver mon exploit sportif de la veille, mais mes courbatures me rappellent rapidement à l’ordre. Je ne me décourage pas et décide qu’après ma journée de travail j’irai me promener au jardin japonais. Ma journée se déroule sensiblement de la même manière que celle d’hier, rythmée par mes (trop) nombreuses pauses café.

 

A 17 h 30 j’enfile mes baskets et fonce en direction de ce jardin que j’apprécie tant. Le jardin japonais possède un plan d’eau, des bancs pour s’asseoir ainsi qu’un superbe espace asiatique qui aurait réussi par m’offrir un dépaysement total si mes pas ne m’avaient pas mené vers… l’aire de jeux des enfants. Le premier cri d’enfant me transperça les tympans et me ramena sur terre plus vite qu’une fusée de Space X. Je déteste les aires de jeux, mais le plus terrifiant autour d’un toboggan ce ne sont pas les enfants dessus, mais plutôt les cernes des parents autour. Déjà que j’ai du mal à m’occuper de Rodolphe je ne comprends même pas comment ces gens font pour s’occuper d’un mini être humain chaque jour de l’année pour au moins 18 ans. Après cette réflexion ma migraine et moi décidons de rentrer à la maison (loin de toutes traces d’enfants).

 

Jour 4 :

Le soleil qui passe à travers mes rideaux me fait cligner des yeux. Je me réveille doucement, l’esprit encore embrumé, mais un détail retient mon attention. Mon réveil n’a pas sonné ce matin ou du moins je n’en ai aucun souvenir. Je penche alors la tête pour lire l’heure : 9 h 02. Panique. Sans prendre le temps de me réveiller je me sers un café et me colle devant mon ordinateur. Sur notre chat interne, Jeanne ma collègue n’hésite pas à faire remarquer mon retard à toute la boîte, de quoi me mettre en rogne pour le reste de la matinée.

 

Ce soir, je décide de reprendre une de mes activités préférées : la chasse aux couchers de soleil au-dessus de la Garonne. J’enfile mon manteau, fais une caresse à Rodolphe et part avec mon appareil photo autour du cou. Une fois arrivée place du Capitole je décide de rejoindre les quais de Garonne à pied. Le calme de la place Saint Pierre me surprend presque. Les étudiants qui ont pour habitude de peupler en nombre cette place, ont fui et seuls les pigeons demeurent. Les nombreux bars qui encadrent ce lieu prisé des jeunes toulousains ont fermé leur rideau métallique, emportant avec eux toute la dynamique et la joie qu’incarne habituellement cette place. Les jeudis soirs avec leurs bars bondés qui me donnaient qu’une envie : rentrer chez moi en courant, me manqueraient presque.

 

Alors que j’arrive sur le Pont Neuf le spectacle qui s’offre à moi me bouleverse comme à chaque fois. Le soleil qui disparait derrière l’Hôtel Dieu baigne les quais d’une lumière orange inimitable et les premières lumières de la ville qui s’éclairent forme une farandole de petits points lumineux. Je brandis mon appareil photo pour capturer ce moment magique, complètement hors du temps.

 

Alors que la pénombre commence à envahir la ville je décide de rentrer me mettre au chaud.

 

Alizée

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